Traverser les États-Unis en 65 jours avec Antoine Clément

Traverser les États-Unis en 65 jours avec Antoine Clément

Categories : Recits de sportifs

Présentation

"Pour rappel, Antoine Clément est un jeune traileur qui s’est lancé un défi fou en avril 2024 : Traverser les Etats-Unis de l’ouest, du Mexique au Canada en 80 jours. Ce challenge monstrueux lui servira d’expérience conséquente pour peut-être un jour participer à la mythique Barkley réservée aux meilleurs athlètes Trail. Ce périple représente tout de même 4200 km, 120000m D+, jusqu’à 4000 m d’altitude et au moins 1000 km de désert à traverser seul pendant tout ce temps. 

Aujourd’hui Antoine a réussi son défi, suivi par des milliers de personnes, il nous raconte cette fabuleuse histoire."

Camille Thiré souriante avec une casquette

Comment te sens-tu depuis cet immense exploit que tu viens de réaliser ?

"Difficile d'expliquer le sentiment qui m'anime, c'est un mélange entre un sentiment d'accomplissement et de fierté par rapport à ce que je viens de réaliser, je ne m'attendais pas à réaliser ce tracée en 65 jours alors que j'avais prévu 80 jours de base. Mais j'ai également un sentiment de nostalgie, j'étais hors du temps, concentré sur mon aventure pendant 2 mois et il est difficile de revenir à la réalité après quelque chose d'aussi intense, mais je m'estime très reconnaissant envers ce sentier, les gens que j'ai rencontré. J'ai fait le plein d'expériences et de souvenirs qui seront gravés à jamais. C'était l'aventure d'une vie avec mon projet de Barkley. Et comme je dis souvent on peut tout enlever dans votre vie, mais jamais les souvenirs que vous avez."

Quelle nutrition as-tu emporté avec toi et comment t’es-tu alimenté chaque jour ?

"Alors j'ai eu la chance d'être accompagné par Meltonic pour les premiers jours de cette traversée, et je vous avoue que ça m'a beaucoup rassuré, d'avoir une nutrition de qualité, qui change de ce qu'on peut manger aux États Unis, et de me sentir soutenu également. Je suis extrêmement reconnaissant envers Meltonic d'avoir cru en moi. J'avais pris un mélange de Pur'Bar et de Boissons et c'est passé tout seul. 

Pour la suite j'ai dû m'adapter au pays, et à ce que je pouvais trouver sur le terrain, mais c'était clairement pas "healthy food", sans citer des marques c'était beaucoup de choses très sucrées, (j'ai pris rendez-vous chez le dentiste à mon retour je vous rassure), l'idée c'était de pouvoir assimiler entre 5000 et 10 000 calories selon les jours, et le kilométrage. Mais dans l'ensemble c'était beaucoup de snacks, et je profitais des moments en ville pour manger de vrais plats. "

Quel est ton meilleur souvenir de cette traversée ?

"Mon meilleur souvenir d'un point de vue global ça reste mon expérience que j'ai vécu dans la "Sierra Nevada" qui est une zone de 600 km très montagneuse (passage à 4000m d'altitude), et très sauvage, éloigné de toute civilisation. J'ai pu être confronté à l'extrême solitude, sans contact avec l'extérieur, transpirer ma nourriture pendant 1 semaine, je me suis senti tellement bien, c'était reposant et les journées étaient vraiment plaisantes avec des paysages magnifiques et un terrain plus technique."

Camille thiré en pleine course sur un pont pendant l'automne

As-tu traversé des moments de peur, de doute (mentalement et physiquement) ?

"Oh que oui... je ne pourrai pas tous les citer malheureusement. Sur le plan physique j'ai eu beaucoup de chance, hormis la première semaine,  mon corps c'est très vite habitué à l'effort, pour le mental c'était une alternance entre des moments bas et des moments hauts, parfois dans une même journée il pouvait m'arriver de sourire et d'être euphorique et quelques heures après de verser ma larme à cause de la fatigue ou de la frustration d'avoir perdu mon chemin ou d'avoir faim. J'ai subi la déshydratation dans le désert et j'ai vraiment cru que j'allais mourir, j'ai dû courir 4 heures sans boire sous 40 degrés, pour rejoindre la civilisation, c'était probablement la pire expérience de trail de ma jeune carrière."

Quel est ton conseil pour les athlètes comme toi qui ont de grands objectifs sportifs en tête ?

"Ça peut paraître too much, mais je pense qu'il faut vraiment croire en soi, et foncer, ne pas se fixer de limites, le corps est une machine incroyable qui s'adapte, et qui peut vous emmener très loin. Je dirai également, de bien s'entourer, c'est très important, d'avoir des gens autour de vous qui peuvent vous soutenir au quotidien, mentalement ça fait du bien. Et dernier conseil qui je pense est l'un des plus importants, c'est celui d'accepter de souffrir, comme disait Dostoïevski "La souffrance fait naître la conscience", quand on souffre dans un effort, on se sent pleinement vivant et on finit par s'endurcir, et on relativise sur certaines choses dans la vie. J'ai fini par arrêter de me plaindre dans beaucoup d'aspects de la vie grâce à ce sport."

D’où t’es venu cette envie de participer à la Barkley ? Une pensée à Aurélien Sanchez, premier français à l’avoir remportée ?

"Avant de commencer le trail, je faisais beaucoup de musculation et de sports de combats, j'ai toujours été un coureur correct grâce à ma génétique, mais je n'avais jamais couru plus de 10km. Je faisais également beaucoup la fête à l'université. En me baladant sur Facebook en 2018, je suis tombé sur un reportage de Alexis Berg, qui s'appelait "la Barkley sans pitié" racontant l'histoire mythique de la Barkley 2017, avec l'échec de Gary Robbins. Et ça a été comme une sorte de révélation pour moi, je me suis dit, je veux être comme ce type, je veux vivre moi aussi cette incroyable course mystérieuse. Je me suis donc inscris les coordonnées du départ de la course sur un bracelet que je n'ai jamais lâché depuis 6 ans. 

Effectivement Aurélien, est une grande inspiration, je l'avais rencontré avant qu'il finisse la Barkley, sur une course, où j'avais pu courir quelques kilomètres, et il est très humble et on ressent vraiment sa passion pour la montagne, et il a prouvé qu'en étant un coureur peu connu, on peut y arriver grâce à l'effort, à l'abnégation, et en n'abandonnant jamais son rêve, il a vécu beaucoup d'échecs en se relevant toujours. Il sera à jamais le premier, et j'espère le rejoindre."

Le prochain objectif ? La Barkley ?

"Alors, effectivement je l'espère, si l'organisateur accepte. Je participe à la Barkley fall classic, une sorte de mini Barkley en fin septembre ouvert à tous pour pouvoir obtenir mon entrée dans la course directement sans passer par le processus classique. Je croise les doigts. Mais si jamais je n'étais pas sélectionné cette année, on retentera tous les ans, Aurélien a attendu 6 ans alors je peux bien attendre quelques années aha."

Add a comment